Résistance aux antibiotiques: aperçu et position

En médecine humaine comme en médecine vétérinaire, les antibiotiques sont prescrits contre les maladies infectieuses bactériennes. En empêchant les bactéries de se multiplier et en les tuant, ils combattent la cause du mal plutôt que ses symptômes. Aujourd’hui, tous les efforts doivent être entrepris pour relever le défi mondial de plus en plus sérieux qu’est la résistance bactérienne aux antibiotiques (l’antibiorésistance).

En médecine, les antibiotiques ne sont pas seulement utilisés contre des infections aiguës graves, mais aussi pour prévenir des risques d’infection, par exemple après une intervention chirurgicale. Du fait de leur prescription fréquente et de leur utilisation parfois inappropriée, ils perdent toutefois de leur efficacité. On constate que celle-ci diminue dans le monde entier, tandis que la mondialisation contribue à la propagation des résistances.[1]

L'une des possibilités de vaincre les résistances serait de développer de nouveaux antibiotiques. Mais l’effort de recherche correspondant nécessite des investissements financiers importants et toute la question est de savoir qui les financera. L’antibiorésistance étant devenue un problème mondial majeur, la solution doit donc être trouvée dans une approche mondiale. Voilà pourquoi la Fédération internationale de l’industrie du médicament (IFPMA) s'est penchée, elle aussi, sur ce problème.  

Nouvelles approches internationales

Diverses parties prenantes, dont les Nations unies, l'Organisation mondiale de la santé, le Wellcome Trust ainsi que des gouvernements de premier plan reconnaissent toute l’importance du problème en soulignant que le secteur biopharmaceutique peut jouer un rôle crucial dans la réduction de la résistance aux antimicrobiens comme dans le développement de nouveaux antibiotiques contre les infections. Les membres de l’association pharmaceutique internationale IFPMA se sont réunis à cette fin au sein de l'alliance Antimicrobial resistance (AMR) Industry.

Ce groupement de plus de 100 fabricants de procédés biotechnologiques, de diagnostics, de produits pharmaceutiques et de génériques veut contrer la sérieuse menace que pose la progression de la résistance aux antibiotiques, laquelle est déjà responsable de 700 000 décès par an et pourrait coûter jusqu'à 100’000 milliards de dollars à l'économie mondiale d'ici 2050 si l'on n'agit pas immédiatement.[2]  Les membres de l'AMR Industry Alliance réagissent à l'urgence du défi en collaborant avec les gouvernements, les organisations à but non lucratif, les chercheurs du secteur public, les professionnels de la santé et les organismes payeurs. Le rapport d’avancement de l’industrie AMR livre une mise à jour des efforts déployés dans ce domaine.

Stratégie Antibiorésistance Suisse (StAR)

En Suisse, la Stratégie nationale contre la résistance aux antibiotiques (StAR) a été adoptée en 2015, avec pour objectif d’assurer l'efficacité durable des antibiotiques pour la santé humaine et animale. Sa mise en œuvre suit l'approche One-Health (« une seule santé »), qui prévoit une large participation des parties prenantes. One-Health applique le principe d'une collaboration interdisciplinaire entre la médecine humaine et la médecine vétérinaire, en intégrant les groupes de contact de l'agriculture et de l'environnement.

Les mesures prévues par cette stratégie contre la résistance aux antibiotiques se répartissent en huit champs d'action : prévention, utilisation pertinente des antibiotiques, conditions-cadres, information et formation, coopération, recherche et développement et surveillance. Il est important que tous les acteurs – des trois champs de la politique, de l’industrie, de la recherche - contribuent à cette lutte, comme le recommande le premier rapport de 2017 Stratégie Antibiorésistance. L'industrie est ouverte à la discussion sur de nouveaux systèmes d'incitation, tout en gardant à l'esprit que sur le marché pharmaceutique mondialisé, les solutions nationales sont peu efficaces et qu’une collaboration plus étroite entre le monde politique, la science et l'industrie offre les meilleures chances.

En juin 2023, un atelier réunissant différents partenaires et parties prenantes issus de la recherche, de la politique et de l'économie a permis d'échanger et d'élaborer des idées et des propositions pour le plan d'action One-Health 2024-27 de la StAR. L'objectif de ce plan d'action est de donner de nouvelles impulsions et de définir de futures mesures dans les différents champs d'action de la stratégie.

Système d'information sur les antibiotiques en médecine vétérinaire (SI ABV)

Le SI ABV fait partie intégrante de la stratégie de lutte contre la résistance aux antibiotiques. Depuis le 1er janvier 2019, les vétérinaires enregistrent leurs prescriptions d'antibiotiques dans ce système d'information. Cette base de données permet de suivre le recours aux antibiotiques pour les animaux de compagnie comme pour les animaux de rente. En 2022, deux rapports distincts ont montré pour la première fois la façon dont les antibiotiques sont utilisés dans ces deux catégories.

Les rapports livrent un aperçu des quantités d'antibiotiques, du nombre de prescriptions et du nombre d'animaux traités. Les chiffres révèlent que la quantité d'antibiotiques vendus ou administrés en médecine vétérinaire est en baisse depuis des années. Des efforts supplémentaires sont cependant nécessaires pour continuer à réduire leur consommation.

Dans le domaine des animaux de rente notamment, il s'est avéré que des substances actives critiques étaient parfois encore remises à titre de réserve : l'Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) poursuivra ses investigations dans ce domaine. Entre-temps, le règlement de l’UE (UE 2019/6) relatif aux médicaments vétérinaires a édicté pour la première fois, au sujet de ces médicaments, des dispositions harmonisées directement applicables par tous les États membres de l'UE. L'utilisation d'antibiotiques destinés aux animaux ainsi que des directives strictes sur la gestion des réserves y sont notamment réglementées. La Suisse adaptera vraisemblablement ses prescriptions en conséquence.

Les antibiotiques en médecine humaine

Pour la médecine humaine, il n'existe pas de système d’information analogue au SI ABV. Une équipe centrale et un pool d'experts ont été constitués pour la mise en œuvre de la Stratégie suisse contre la résistance aux antibiotiques dans le domaine humain. Ils conseillent l'OFSP sur les thèmes stratégiques et techniques de mise en œuvre.

L'accent est mis sur l'amélioration de la surveillance avec le Laboratoire de référence pour la détection précoce et la surveillance des résistances émergentes aux antibiotiques (NARA - Centre national de référence pour la détection précoce des résistances émergentes aux antibiotiques). Des lignes directrices ont été définies à l’intention des hôpitaux suisses pour soutenir et promouvoir la prescription, la remise et l'utilisation appropriées des antibiotiques. Leur objectif est que le bon antibiotique soit prescrit au bon moment, à la bonne dose et pour la durée adéquate.